Damien Saurel
Le Procès romain de Jésus, octobre 2019
Pourquoi ce livre sur le procès de Jésus ?
Damien Saurel : La rédaction de ce livre fait suite à la lecture d'un livre : Pilate et Jésus du philosophe italien Giorgio Agamben. C'est un livre remarquable, qui m'a permis de redécouvrir la figure de Jésus et d'élargir ma réflexion sur la question des fondements du droit. La lecture du livre d'Agamben aurait pu me satisfaire pleinement, mais à force de le relire je me disais qu'il y avait plus encore à découvrir, plus encore à comprendre dans ce procès de Jésus. J'ai donc pris à mon tour la plume pour explorer cette énigme judiciaire...
Peut-on y découvrir des éléments nouveaux que les historiens ignoraient jusqu’à présent ?
Damien Saurel : Un livre qui parle juste est celui qui parvient à mener la synthèse d'éléments disparates qui, déjà existants mais épars, une fois croisés, recoupés et distingués donnent un résultat éclatant. Ce résultat peut apparaître neuf bien qu'en fait il ne soit que le résultat d'une mise en relief, d'une reconstitution, d'un nouvel éclairage d'éléments déjà présents dans les sources juives et romaines.
Qu’est-ce que le droit romain peut nous apprendre de plus que le récit des évangiles ?
Damien Saurel : Là encore, je nuancerai ma réponse, en disant que le droit romain ne se substitue pas au récit des évangiles mais qu'il s'y superpose... Ce sont les évangiles qui nous invitent à scruter du côté du droit romain : il s'agit d'un procès, celui de Jésus devant la plus haute autorité exerçant le pouvoir au nom de César en Judée. S'il s'agit d'un procès sous l'Empire romain, il devient incontournable d'étudier la façon dont les romains rendaient la justice à cette époque, qui est celle, très particulière et nouvelle alors, des débuts de l'Empire. Tous ces paramètres entrent en jeu dans le cadre du procès de Jésus. Ce que je peux dire tout de suite ici, c'est que le droit romain confirme de manière éloquente le récit tumultueux du Procès rapporté par les quatre évangélistes. Cela ressort de façon très spécifique en ce qui concerne la provocatio et la sacratio. Rappelons que la science juridique des romains était universellement vantée : « Scientibus enim legem loquor » ! Elle constitue une base d'analyse solide.
Finalement, Pilate a-t-il condamné Jésus ?
Damien Saurel : Non ! Clairement, non. Et déjà Agamben dans son livre Pilate et Jésus en arrivait à cette « étrange » conclusion. Pilate n'a prononcé aucune formule de condamnation, au contraire, il a même à plusieurs reprises lors du procès déclaré qu'il ne trouvait aucun motif de condamnation : « Pilate leur dit : "Pour moi, je ne trouve en lui aucun motif [de condamnation]" » (Jn 18,38) ; « Quel mal a-t-il donc fait ? Je n'ai rien trouvé en lui qui méritât la mort » (Lc 23,22). Ce qui ne l'a pas conduit, non plus, et cela est très étrange aussi, à prononcer l'acquittement de Jésus ! Jésus n'a pas été légalement condamné à mort par les Romains...